L'art de trop se compliquer la vie avec les outils : leçons tirées d'un projet d'IA
Découvrez comment notre quête du "meilleur" outil a failli faire échouer notre projet d'IA avant même qu'il ne commence.

Quand on démarre un projet tech, on a souvent tendance à vouloir tout optimiser dès le départ. Outils dernier cri, méthodologies à la mode, plateformes sophistiquées... On s'imagine qu'une infrastructure complexe est synonyme de professionnalisme. C'est exactement le piège dans lequel je suis tombé lors du lancement de Generative101, notre plateforme dédiée à l'IA usage-first.
Ce retour d'expérience raconte comment une simple différence de préférence d'outils a failli saboter nos débuts, et les leçons que nous en avons tirées.
Un témoignage pour tous ceux qui, comme moi, doivent régulièrement se rappeler que la technologie est au service du projet, et non l'inverse.

Un démarrage qui devait être simple.
Début 2025, avec Ange, nous décidons de concrétiser un projet qui nous tient à cœur : créer une plateforme qui démocratise l'accès à l'IA avec une approche centrée sur l'usage plutôt que sur la technologie.
Nous sommes tous deux convaincus du potentiel de transformation de ces technologies, mais aussi conscients que leur adoption massive passe par la simplicité d'usage.
Le plan initial était d'une simplicité désarmante :
- Chacun note ses idées et réflexions
- On partage, on discute, on affine
- On prototype rapidement
- On teste auprès d'utilisateurs potentiels
Une approche lean et agile, classique mais efficace. Sauf que...

L'erreur classique : la bataille des outils
C'est là que le premier obstacle est apparu. En tant que formateurs tech, nous connaissons pourtant bien le principe : "l'outil idéal est celui que toute l'équipe adopte naturellement." Mais comme souvent, nous avons été incapables d'appliquer à nous-mêmes le conseil que nous donnons régulièrement à nos clients.
Moi, j'étais profondément convaincu que Notion était LA solution ultime. J'imaginais déjà :
- Des bases de données relationnelles pour lier nos idées
- Des templates sophistiqués pour chaque type de document
- Des pages imbriquées pour une organisation parfaite
- Des tableaux Kanban intégrés pour suivre notre progression
Ange, de son côté, privilégiait l'écosystème Google Drive : simple, accessible, collaboratif en temps réel, et déjà parfaitement intégré à son flux de travail quotidien.
Cette divergence n'était que la partie émergée de l'iceberg. En réalité, elle reflétait une différence d'approche plus profonde face à l'innovation : ma tendance à chercher l'outil "parfait" avant même de commencer le travail substantiel.

Travailler en parallèle plutôt qu'ensemble.
Pendant plusieurs jours, nous avons chacun documenté notre vision de Generative101 dans nos outils respectifs :
- Moi dans mon Notion ultra-structuré, avec des catégories, des tags, et une architecture complexe
- Ange dans ses Google Docs, avec une approche plus linéaire et directe
Au moment de fusionner nos réflexions pour notre première réunion de travail approfondie, la catastrophe : impossible de consolider proprement nos idées. Nous nous sommes retrouvés à faire des copier-coller bancals, à chercher des informations éparpillées entre deux systèmes, et à perdre un temps précieux à tenter de créer une vision cohérente à partir de formats incompatibles.
Ce qui aurait dû être une simple session de brainstorming s'est transformé en un exercice fastidieux de compilation de données. La frustration montait, la créativité diminuait.

La simplicité comme principe directeur.
Cette expérience nous a rappelé (de façon un peu brutale, avouons-le) quelques principes fondamentaux que nous connaissions pourtant bien :
1. La valeur de la simplicité
Les solutions les plus simples sont souvent les plus robustes. Un Google Docs partagé avec des sections claires permet à tout le monde de contribuer sans friction.
2. L'importance de l'alignment sur les outils dès le départ
Avant même de commencer à travailler sur le contenu, il est crucial de s'accorder sur les outils et méthodes de collaboration.
3. L'adoption > la sophistication
Un outil sophistiqué que seule une partie de l'équipe utilise avec aisance crée plus de problèmes qu'il n'en résout.
4. Le coût caché des outils multiples
La multiplication des outils entraîne une fragmentation de l'information et une perte significative d'efficacité.

Le retour à l'essentiel.
Après cette expérience, nous avons radicalement simplifié notre approche. Nous avons opté pour un unique Google Docs structuré en "one-pager" avec des sections clairement délimitées. Moins sophistiqué que mon beau Notion, certes, mais infiniment plus efficace pour notre travail d'équipe.
Cette approche minimaliste nous a permis de :
- Concentrer toutes nos idées au même endroit
- Collaborer en temps réel sans friction
- Éviter la dispersion d'information
- Maintenir une vision claire et partagée du projet
C'est cette philosophie de simplicité qui guide désormais l'ensemble de notre processus de création de contenu pour Generative101.

Les quatre principes pour éviter l'obsession des outils
Fort de cette expérience et des nombreuses situations similaires que j'ai pu observer chez d'autres entrepreneurs et innovateurs, j'ai identifié quatre principes essentiels pour ne pas tomber dans le piège de l'obsession des outils.
C'est d'ailleurs ce que je défend lorsque je donne des formations / workshops sur le sujet, comme quoi ... parfois on oublie d'appliquer ses propres bonnes pratiques 😉
1. Commencez avec ce que vous avez déjà
L'outil que vous maîtrisez aujourd'hui est presque toujours suffisant pour démarrer. Avant d'investir du temps dans l'apprentissage d'un nouvel outil, demandez-vous honnêtement si vos outils actuels ne pourraient pas faire l'affaire, au moins pour les premières étapes.
Une startup spécialisée en IA que j'accompagne a passé plusieurs semaines à comparer des solutions de gestion de projet avant de réaliser qu'un simple tableau Trello suffisait amplement pour leurs besoins actuels. Ces longues semaines auraient pu être consacrées au développement de leur produit.
2. Priorisez l'adoption collective sur les fonctionnalités
L'outil le plus puissant du marché devient inutile si la moitié de votre équipe refuse de l'utiliser ou ne comprend pas comment s'en servir efficacement. La valeur d'un outil réside dans son adoption, pas dans sa liste de fonctionnalités.
Une équipe de recherche que j'ai croisé en workshop a abandonné un outil de collaboration spécialisé après trois mois de frustration. Malgré ses capacités avancées, seuls deux membres sur cinq l'utilisaient pleinement. Ils sont revenus à une combinaison plus simple d'outils que tous maîtrisaient, augmentant immédiatement leur productivité.
3. Évoluez progressivement, en fonction des besoins réels
Il est tentant de vouloir anticiper tous les besoins futurs et de choisir l'outil le plus complet possible. Résistez à cette tentation. Commencez simple et n'ajoutez de la complexité que lorsque le besoin se fait réellement sentir et qu'il est partagé par l'équipe.
Une startup de développement logiciel que j'ai conseillé à EuraTechnologies a adopté une approche d'évolution progressive de ses outils. Ils ont commencé avec un wiki basique pour documenter leur code, puis sont passés à une solution plus robuste uniquement lorsque toute l'équipe a ressenti le besoin de fonctionnalités plus avancées. Cette transition s'est faite sans résistance car elle répondait à un besoin concret.
4. Évaluez régulièrement la valeur ajoutée réelle
Prenez l'habitude de questionner périodiquement l'utilité de chaque outil. Demandez-vous : "Cet outil nous fait-il gagner plus de temps qu'il n'en consomme ? Améliore-t-il réellement notre travail ou ajoute-t-il surtout de la complexité ?"
Un manager en agence lilloise, chez qui je suis intervenu en renfort d'équipe, a mis en place un "audit d'outils" trimestriel dans son équipe. Chaque outil utilisé est évalué selon une métrique simple : le ratio entre le temps gagné grâce à l'outil et le temps passé à le gérer. Cette pratique a permis d'éliminer plusieurs outils "zombies" qui semblaient indispensables mais étaient en réalité contre-productifs.

Les bénéfices inattendus de notre erreur.
Avec le recul, cette erreur initiale s'est avérée précieuse pour plusieurs raisons :
- Clarification de nos valeurs d'équipe : elle nous a permis d'expliciter l'importance que nous accordons à la simplicité et à l'efficacité.
- Cohérence avec notre vision produit : si nous prônons une IA usage-first, accessible à tous, notre propre processus de création doit incarner ces mêmes principes.
- Un cas d'étude concret : cette expérience est devenue un exemple que nous partageons avec notre communauté de beta-testeurs pour illustrer l'importance de ne pas sur-optimiser les débuts d'un projet.
- Une meilleure compréhension mutuelle : cet épisode nous a permis de mieux comprendre nos préférences respectives et d'établir des compromis efficaces pour la suite.
Les symptômes d'une obsession des outils à surveiller.
Au fil de cette aventure, j'ai identifié plusieurs signes révélateurs d'une obsession contre-productive des outils. Si vous reconnaissez plus de deux de ces symptômes dans votre équipe, il est peut-être temps de prendre du recul (ou de m'appeler pour en discuter ensemble) :
- Le syndrome de la paralysie comparative : passer des jours, voire des semaines, à comparer des solutions sans prendre de décision.
- La migration perpétuelle : changer d'outil tous les quelques mois, sans jamais atteindre une utilisation optimale d'aucun d'entre eux.
- L'argument du "must-have" : justifier l'adoption d'un nouvel outil en invoquant une fonctionnalité spécifique dont personne ne se servira finalement.
- Les discussions interminables sur les outils : quand les réunions d'équipe sont davantage consacrées aux outils qu'au contenu du projet lui-même.
- La fragmentation de l'information : l'impossibilité de retrouver une information car personne ne sait dans quel outil elle a été stockée.

En bref.
Cette leçon sur la simplicité des outils n'était que le début de notre aventure Generative101. Côté technique, j'ai également fait d'autres erreurs "indispensables" qui ont jalonné notre parcours et enrichi notre apprentissage collectif. Mais ça, je garde des histoires à raconter ici dans les prochaines semaines.
Au final, notre expérience rejoint celle de nombreux entrepreneurs tech : ce sont souvent les détails apparemment anodins (comme le choix d'un outil de documentation) qui peuvent avoir l'impact le plus significatif sur la dynamique initiale d'un projet.
N'oublions jamais de valoriser le pragmatisme au-dessus de la perfection théorique. Les outils doivent faciliter notre travail, non pas le définir ou le contraindre. Ils sont les moyens, jamais la fin.
Bref, bienvenue dans les coulisses de https://www.generative101.club/ 🥳
Cet article fait partie d'une série "Building in Public" où je partage les coulisses de la création de Generative101, notre plateforme dédiée à l'IA usage-first. Suivez notre aventure pour découvrir nos succès, nos échecs, et nos apprentissages en temps réel.
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