Comment transformer l'IA en argument positif dans vos propales ?
Vos clients savent que vous utilisez l'IA. Ne rien dire ne vous protège plus : ça vous rend suspect. Trop en parler vous dévalue. Voici comment trouver le bon équilibre.
Les agences utilisent massivement l'IA pour répondre aux briefs clients. Le problème n'est pas là. Le vrai enjeu : la plupart n'en parlent pas.
Ou en parlent tellement mal qu'elles sabotent leur propre valeur perçue.
Résultat : soit le client découvre l'usage d'IA après coup et perd confiance, soit l'agence reste floue et se retrouve en concurrence frontale avec ChatGPT.
La solution n'est ni dans l'opacité ni dans l'aveu coupable. Elle est dans un discours qui positionne l'IA comme un multiplicateur de votre savoir-faire, pas comme un substitut bon marché.
Spoiler de fin d'article :
Les clients savent que vous utilisez l'IA.

Baaaaah, pourquoi le silence n'est plus tenable ?
Il y a trois ans, ne rien dire sur l'IA dans une réponse à brief était une non-décision par défaut. Aujourd'hui, c'est devenu un choix risqué.
Les clients ne sont pas idiots : ils savent que vous utilisez ces outils. Quand vous ne dites rien, vous créez deux problèmes symétriques.
Le premier : la suspicion. Le client se demande si vous avez balancé ses données dans ChatGPT sans réfléchir, si vous avez un process ou si vous bricolez, si la qualité sera au rendez-vous ou si vous livrerez du générique reformaté. Cette suspicion ne s'exprime pas toujours frontalement, mais elle pèse sur la décision. Face à deux agences équivalentes, celle qui assume et explique son usage de l'IA sera perçue comme plus mature que celle qui reste évasive.
Le second : la banalisation. Si vous ne montrez pas comment vous utilisez l'IA différemment de vos concurrents, le client va naturellement aligner votre offre sur le tarif d'un freelance qui "fait pareil avec ChatGPT". En ne disant rien, vous renoncez à défendre votre valeur ajoutée. Vous laissez le client combler le vide avec ses propres suppositions, rarement favorables.
À l'inverse, trop en parler sans cadrage tue aussi la valeur perçue. Si votre réponse à brief met l'IA au centre du dispositif, le client entend : "On a trouvé un moyen de faire moins d'efforts pour le même prix." Ce n'est jamais ce que vous voulez vendre.
L'enjeu est donc de trouver le bon dosage : dire assez pour rassurer et différencier, pas trop pour ne pas cannibaliser votre positionnement. Et surtout, dire la bonne chose au bon endroit dans la réponse.

Alors, quand et comment en parler ?
Toutes les réponses à un brief ne se ressemblent pas. Selon le contexte, l'usage de l'IA doit être abordé différemment. Ou pas du tout.
Dans un appel d'offres, surtout dans un secteur régulé, vous n'avez plus vraiment le choix. Les clients posent explicitement la question, parfois dans une section dédiée de leur grille d'évaluation. Ne pas répondre ou rester vague vous disqualifie. Ici, la transparence est obligatoire, mais elle doit être maîtrisée. Vous devez montrer que vous avez un process industriel, pas une utilisation opportuniste.
Le client veut savoir où partent ses données, qui supervise les outputs, comment vous garantissez la conformité. C'est un exercice de réassurance plus que de vente.
Dans une "simple" demande de prix, où le client cherche à comparer des approches, mentionner l'IA devient un levier de différenciation. Vous n'êtes pas obligé d'en parler, mais si vous le faites bien, vous pouvez créer un écart avec des concurrents qui soit n'en parlent pas du tout, soit en parlent maladroitement. L'objectif est de montrer que vous maîtrisez un outil puissant que d'autres utilisent en dilettante. Ici, l'IA doit être présentée comme un amplificateur de votre expertise, pas comme une béquille.
Dans un pitch créatif, la situation se complique. Si vous êtes le seul à mentionner l'IA, vous prenez un risque : attirer l'attention sur un sujet qui peut détourner le client de l'essentiel (oui, on parle bien de vos idées là). Si tous vos concurrents en parlent, ne rien dire vous fait passer pour dépassé ou naïf. La bonne approche dépend du niveau de maturité du client sur le sujet. Un client mature appréciera une mention sobre et maîtrisée de l'IA dans votre process. Un client méfiant ou peu informé pourrait interpréter cette mention comme un signal de faiblesse. Dans le doute, mieux vaut intégrer l'IA de façon discrète dans la description de votre méthodologie, sans en faire un argument en soi.
Enfin, dans le cas d'un renouvellement avec un client historique, la question se pose différemment. Si vous avez déjà travaillé ensemble sans IA, introduire le sujet dans une réponse de renouvellement peut créer de la confusion : "Pourquoi vous ne l'utilisiez pas avant ? Est-ce que ça veut dire que vous alliez moins vite avant ?" À l'inverse, si le client sait que vous utilisez déjà l'IA, ne pas en parler dans la réponse peut sembler bizarre. L'idéal est de connecter l'usage de l'IA à une amélioration concrète que le client peut mesurer : plus de variantes testées, délais réduits, ou capacité à traiter des volumes de données impossibles à gérer manuellement.

Alors, comment éviter de se tirer une balle dans le pied ?
La différence entre une mention d'IA qui valorise et une mention qui dévalorise tient souvent à une nuance de formulation. Il ne suffit pas de dire "nous utilisons l'IA". Il faut expliquer ce que ça change concrètement pour le client, et surtout positionner l'humain au bon endroit dans le process.
First : l'IA comme infrastructure de veille et d'analyse
Beaucoup d'agences utilisent l'IA pour cartographier rapidement un secteur, synthétiser de la veille concurrentielle, ou identifier des angles stratégiques avant de les arbitrer. Ouais, Perplexity quoi. C'est l'usage le plus défendable, parce qu'il ne touche pas directement à la production de livrables. Mais si vous dites simplement "nous utilisons l'IA pour faire de la veille", vous venez de dire au client : "on tape des requêtes dans ChatGPT au lieu de lire."
La bonne formulation connecte l'IA à une augmentation de capacité, pas à une réduction d'effort.
Par exemple : "nous mobilisons des outils d'analyse sémantique pour cartographier 10 000 sources en 48 heures au lieu de trois semaines. Cela nous permet de consacrer 80 % du temps projet à la stratégie et aux arbitrages critiques, pas à la collecte" (oui, c'est long, mais ça claque).
Vous vendez ici une puissance de feu augmentée, pas un raccourci. Le client comprend que vous avez accès à une vision plus large, plus rapide, plus complète que ce qu'une équipe humaine pourrait produire manuellement dans le même délai.
Cette approche fonctionne particulièrement bien dans les réponses à un brief qui exigent une phase d'audit ou de diagnostic. Vous pouvez montrer que votre capacité d'analyse est supérieure à celle d'une agence traditionnelle, tout en repositionnant votre valeur sur l'interprétation stratégique des résultats. L'IA devient un outil de puissance, pas de paresse (enfin si, ça demande du boulot d'être un bon pirate).
L'IA comme atelier de production de variantes
C'est l'usage le plus courant et le plus risqué à mentionner. Beaucoup d'agences utilisent l'IA pour générer des premières versions de contenus, des variantes de messages, ou des déclinaisons multicanales. Le problème : si vous dites "l'IA génère les contenus, on les relit" (ou re-bosse si c'est de l'image), vous venez de vous positionner comme correcteur, pas comme créateur. Vous avez transformé votre équipe en couche de validation d'un outil automatique. Le client entend : "ils font moins, mais facturent pareil".
La bonne formulation inverse la hiérarchie.
Vous ne vendez pas la génération, vous vendez la multiplication des options et la qualité de l'arbitrage. Par exemple : "nous générons systématiquement cinq à dix versions de chaque élément de langage pour tester différents angles, tonalités et niveaux de risque. Chaque version est ensuite évaluée selon une grille stratégique [pertinence métier, cohérence de marque, exposition juridique] et arbitrée par l'équipe conseil. Ce processus nous permet de livrer des contenus plus robustes, avec un niveau de test qu'aucune agence ne pouvait proposer il y a trois ans.".
Ici, vous ne vendez pas l'accélération. Vous vendez la profondeur.
Le client voit que vous testez plus d'options, que vous anticipez plus de scénarios, que vous réduisez le risque de contresens ou de raté. L'IA n'est plus un raccourci, elle devient un outil de due diligence augmentée. Et surtout, vous repositionnez l'humain sur l'arbitrage stratégique. Et en vrai, c'est la seule partie qui compte vraiment pour le client. Si si. Il vous paie pour ça.
L'IA comme stress-test stratégique
L'usage le plus avancé, et potentiellement le plus différenciant, consiste à utiliser l'IA pour tester la robustesse d'une recommandation avant de la livrer. Simuler la réception d'un message par différents segments de public, identifier les angles d'attaque possibles, anticiper les interprétations involontaires. C'est un usage que très peu d'agences osent faire, et encore moins savent la vendre concrètement.
Si vous dites "on fait valider nos recommandations par l'IA", vous avez perdu. Vous venez de déléguer la stratégie à un robot. Mais si vous dites : "avant de livrer une recommandation stratégique, nous la soumettons à un stress-test multi-scénarios : comment ce message sera-t-il perçu par différents segments ? Quelles interprétations involontaires sont possibles ? Quels angles d'attaque pourrait exploiter un concurrent ou un détracteur ? Ce type d'analyse, impossible à mener manuellement à cette échelle, nous permet de livrer des recommandations déjà éprouvées plutôt que des hypothèses.".
Vous vendez ici la réduction du risque.
Vous positionnez l'IA comme un outil d'évaluation critique, pas de génération. Le client comprend qu'il paye pour un niveau de robustesse supérieur, pas pour un raccourci. Et vous vous différenciez d'agences qui livrent des recommandations basées uniquement sur l'intuition ou sur des focus groups coûteux et lents.
Ouaiiiiis, ça change tout.

Bon, alors, où placer l'information dans la réponse ?
L'emplacement compte autant que la formulation. Mettre l'IA en tête de réponse, dans une section dédiée, revient à en faire le sujet principal. Le client va lire votre réponse à travers ce prisme. À l'inverse, enterrer l'information dans une note de bas de page technique peut donner l'impression que vous cachez quelque chose.
La bonne approche dépend du contexte (merci capitaine obvious)
Dans un appel d'offres formel où la question est explicitement posée, une section méthodologique structurée est attendue. Vous pouvez y détailler votre usage de l'IA sans que cela paraisse forcé. L'objectif est de montrer que vous avez un process maîtrisé, documenté, sécurisé. Vous répondez à une exigence, vous ne créez pas un débat.
Dans une demande de prix, l'idéal est d'intégrer l'IA de façon fluide dans la description de votre méthodologie, phase par phase. Vous ne créez pas de section "IA" isolée, vous montrez comment l'IA intervient à chaque étape du process. Toujours encadrée, toujours supervisée, toujours au service d'un objectif client clair. Cette approche évite de sur-vendre l'IA tout en montrant que vous maîtrisez l'outil.
Dans un pitch créatif, une simple mention discrète c'est déjà pas mal. Vous pouvez glisser une phrase dans la description de votre process ("nous testons systématiquement plusieurs variantes de chaque message pour identifier la plus performante") sans détailler l'outil utilisé. Le client comprend que vous avez un process rigoureux, sans que l'IA devienne le sujet central.
En gros, si l'IA n'est pas le sujet central, ne commencez pas par ça. Dirigez les questions de votre prospect / client vers ce que vous proposez réellement : de la valeur humaine par rapport à son besoin, à lui, qu'il a exprimé avec ses tripes et ses fautes sur Word (ou sa liste à puces ChatGPT).

Allez hop : les trois erreurs qui tuent la valeur perçue !
La première erreur consiste à parler d'IA comme d'une "aide" ou d'un outil d'"accélération". Dès que vous utilisez ce vocabulaire, vous signalez au client que vous faites moins d'efforts qu'avant. Vous pouvez tourner la phrase dans tous les sens, le message reste le même : "on a trouvé un moyen de gagner du temps, mais on facture pareil.".
Même si ce n'est pas votre intention, c'est ce que le client entend.
La solution : ne jamais vendre la vitesse, toujours vendre la profondeur, la robustesse, la capacité augmentée.
La deuxième erreur : sur-détailler la technique. Mentionner le modèle utilisé, la température des prompts, le nombre d'itérations. Le client s'en fiche. Pire, cela donne l'impression que vous êtes plus excité par l'outil que par le problème à résoudre. Vous ressemblez à un geek qui se la joue, pas à un conseil stratégique. La bonne approche : rester sobre sur la technique, concentrer le discours sur les bénéfices clients mesurables. Je suis bien placé sur cette erreur, j'ai eu une bonne tendance à faire ça sur quelques projets ... 🤦♂️
La troisième erreur : oublier de mentionner les garde-fous. Si vous parlez d'IA sans préciser comment vous gérez les données sensibles, comment vous supervisez les outputs, comment vous garantissez la conformité, vous ouvrez une brèche d'inquiétude. Le client va se demander si vous avez vraiment un process ou si vous improvisez. Deux phrases suffisent : où sont traitées les données, qui valide les livrables. Sobre, factuel, rassurant.

En bref : arrêtez de vous cacher, vendez votre maîtrise 🥳
L'IA dans les réponses à brief n'est pas un aveu de faiblesse. C'est une opportunité de repositionner votre valeur sur ce qui compte vraiment : l'arbitrage, la stratégie, la réduction du risque. À condition de savoir en parler.
Ne vendez jamais l'IA comme une réduction d'effort, mais comme une augmentation de capacité. Plus de sources analysées, plus de variantes testées, plus de scénarios anticipés, plus de robustesse. Le client ne paye pas pour que vous alliez plus vite, il paye pour que vous soyez meilleur.
Positionnez toujours l'humain sur l'arbitrage stratégique, jamais sur la production mécanique. L'IA explore, génère, simule. L'humain décide, valide, assume. Cette hiérarchie doit être limpide dans votre discours.
Utilisez la transparence sur l'IA comme un marqueur de maturité professionnelle. Vous ne cachez pas, vous ne surjouez pas, vous expliquez sobrement. Cela positionne votre agence comme un acteur qui maîtrise ses outils, pas comme un opportuniste qui suit la hype ou un bricoleur qui improvise.
Les clients savent que vous utilisez l'IA.
La question n'est plus de savoir s'il faut en parler, mais comment en parler pour que cela renforce votre proposition de valeur au lieu de la cannibaliser. Les agences qui maîtriseront ce discours prendront une longueur d'avance. Les autres se retrouveront en concurrence frontale avec ChatGPT sur les tarifs.